Sub-urbanisme et sur-urbanisme (ou super-urbanisme) peuvent être considérés comme les principales subversions dont le concept et les pratiques de l’urbanisme font aujourd’hui l’objet, la première venant de l’architecture de paysage et la seconde d’une des avant-gardes les plus créatives de l’architecture contemporaine. Tandis que le sub-urbanisme peut être décrit comme une discipline de projet qui regarde le site comme la matrice à partir de laquelle le programme doit être déchiffré, le sur-urbanisme, au contraire, tente littéralement d’inventer le site à travers la manipulation et la construction du programme.

Rem Koolhaas est le héros contemporain du sur-urbanisme et New York délire, son manifeste inégalé. Pour différentes raisons qu’il serait intéressant d’analyser, le sub-urbanisme n’a pas encore trouvé son héros, ni produit une fable capable de rivaliser avec le « manifeste rétroactif pour Manhattan » de Koolhaas. Notre ambition, toute délirante ou ludique qu’elle puisse paraître, est de rectifier cette situation en déplaçant la scène de Manhattan à Ithaca. Il se trouve en effet que cette petite ville, située à l’autre bout de l’état de New York et où l’université de Cornell a son siège, est justement l’endroit où Koolhaas commença à ourdir son intrigue à la fois théorique et poétique. Une légende ne peut être contredite, sinon par une autre légende.

Notre recherche, alimentée par la même paranoïa critique que celle de Koolhaas, vise donc à réunir les ingrédients d’un manifeste relatif du sub-urbanisme, pour démontrer d’une part que le sub-urbanisme ne doit être défendu que relativement (et non absolument) et d’autre part que le sur-urbanisme n’est qu’un moment du sub-urbanisme. Nous essaierons d’aborder les directions principales de cette recherche et quelques-uns des problèmes de composition et de montage qu’elle nous pose en ce moment.

Sébastien Marot est un critique d’architecture et de paysage. Philosophe de formation, il a été le directeur des programmes de la Société Française des Architectes à Paris et le rédacteur en chef de la revue Le Visiteur. Ses recherches personnelles et ses écrits, qui visent à une théorie du sub-urbanisme, se concentrent plus particulièrement sur l’exploration de l’étoffe temporelle des sites et des situations ainsi sur la façon dont elle peut être abordée, exprimée et construite par le projet. Il est l’auteur de plusieurs essais, notamment Sub-Urbanism and the Art of Memory (Londres: AA Publications, 2003 ; traductions espagnole et française à paraître). Se définissant comme un ‘’professing visitor’’, il a enseigné en Europe (IUAG de Genève, ENSP de Versailles, EAVT de Paris et Architectural Association de Londres) et en Amérique du nord (Harvard GSD, University of Pennsylvania School of Design, AAP Cornell et Université de Montréal). En résidence au Centre d’étude du CCA, Sébastien travaille actuellement à la rédaction d’un nouveau livre intitulé Palimpsestuous Ithaca, A Relative Manifesto for Sub-Urbanism.

Sébastien Marot était chercheur en résidence au CCA en 2005.