Notre client, la planète

Ce dossier rassemble dans un esprit proactif quelques approches ciblées de l’architecture en matière d’environnement. Après un bref résumé du contexte (subjectif), il définit, redéfinit et discute certains termes en clarifiant les attitudes qui les fondent. Tant nos erreurs que nos succès y sont documentés, nous permettant ainsi de bien comprendre notre situation actuelle à la lumière du passé. Et puisque nous gardons toujours l’espoir, ce dossier propose de nouvelles possibilités de design – qui, nous le promettons, ne proviennent pas toutes des années 1970. Votre appui à cet égard sera plus qu’apprécié.

Article 9 de 13

Utiliser le sol comme abri

Adam Bobbette va sous terre

Alors que de nombreux architectes et scientifiques se tournent vers les énergies dérivées du soleil et du vent, d’autres décident d’exploiter les possibilités de la terre. Pendant les années 1970 et 1980, le mouvement de « l’architecture sous terre » ne parvient pas à s’entendre sur une terminologie normalisée pour désigner les structures souterraines (underground) ou enfouies (earth sheltered)1.

Selon l’Underground Space Center de l’Université du Minnesota, à Minneapolis, seulement 50 maisons sous terre ont été construites aux États-Unis avant 19762. Malgré cette statistique, la première publication de ce centre de recherche, une monographie plutôt technique, se vend à 160 000 exemplaires entre 1978 et 1981 (et continue de bien se vendre les années suivantes)3. Cela porte à croire que l’intérêt pour ce type d’architecture est plus répandu que ne l’indique le nombre de projets réalisés.

Les deux techniques les plus répandues en architecture domestique sont la couverture de terre (earth-covering) et le remblayage (berming). La première peut s’appliquer à une maison entièrement souterraine ou à une maison partiellement enfouie dont le toit est couvert de terre. Quant au remblayage, il consiste à adosser une levée de terre contre un ou plusieurs des murs extérieurs d’une structure partiellement enfouie. L’Ecology House de John Barnard est une maison souterraine, de même que la résidence que Jay Swayze réalise pour Jerry B. Henderson à Las Vegas, une structure enfouie 7,6 m dans le sol. Parfois, on combine différentes techniques. Ainsi, la Solaria de Malcolm Wells allie toiture couverte de terre et murs extérieurs avec remblais, alors que la Spinach House et les Earthships de Michael Reynolds comportent des murs construits en terre et protégés par des remblais4.


  1. Les publications des années 1970 et 1980 emploient indifféremment les termes earth-sheltered (littéralement, abrité par la terre) et underground (souterrain), comme en témoignent les titres suivants : Earth Sheltered Housing Design: Guidelines, Examples, and References, New York, Van Nostrand Reinhold, 1979; Herb Wade, Building Underground: The Design and Construction Handbook for Earth-Sheltered Houses, Emmaus, PA, Rodale Press, 1983; or Stu Campbell, The Underground House Book, Charlotte, VT, Garden Way, v. 1980. Au-delà des techniques, ces variantes semblent indiquer un souci de la perception psychologique, le premier terme étant considéré plus positif que le deuxième.  

  2. Donna Ahrens, Tom Ellison et Ray Sterling, Earth Sheltered Homes: Plans and Designs, New York, Van Nostrand Reinhold, 1981, p. 17.  

  3. Earth Sheltered Homes: Plans and Designs, op.cit.  

  4. Malcolm Wells, Underground Designs, Brewster, MA, autoédité, 1977; Michael Reynolds, A Coming of Wizards: A Manual of Human Potential, Taos, N.-M., High Mesa Press, 1989; and Michael Reynolds, Earthship Volume 1: Build Your Own, Taos, N.-M., Solar Survival Press, 1990.  

Shelterra Earth Homes Inc., Energy Cost? $100/YEAR!! (Springfield, OH : Shelterra Earth Homes, 1979), catalogue commercial. Underground Space Center ©www.undergroundhomes.com

La terre isole la maison comme si on l’enveloppait dans une couverture, en créant une masse qui réduit les variations de température à l’intérieur. Elle ne remplace pas les matériaux d’isolation traditionnels insérés dans les murs, mais les complète. On considère qu’il s’agit d’un moyen efficace de réduire les coûts de chauffage, certains avançant même la possibilité de réaliser des économies de 70 %1.


  1. Voir Ahrens et coll., Earth-Sheltered Homes: Plans and Designs, op. cit. et Wade, Building Underground, op. cit.  

On jumelle l’enfouissement aux technologies solaires passives et actives. La maison est souvent orientée au sud, où de grandes surfaces vitrées captent le rayonnement solaire. Ouroboros South (1973), réalisée par l’Université du Minnesota, le bureau (1980) construit par Malcolm Wells à Brewster et la maison Demuyt (1979) érigée par l’Earth Shelter Corporation of America en sont trois exemples2. L’orientation unique des fenêtres et l’enfouissement se traduisent souvent par des intérieurs sombres. On tente d’introduire de la lumière par l’aménagement de cours ouvertes ou l’ajout de lanterneaux, ce qui crée souvent des effets visuels insolites, les structures dépassant du sol devenant, à distance, le seul indice de la présence de la maison, comme pour la Sundown House (1975) de David Wright.

L’isolation par enfouissement s’avère un moyen radical d’atteindre un objectif conventionnel. Beaucoup de maisons enfouies ou souterraines se distinguent d’ailleurs fort peu, par leur structure ou leur intérieur, des maisons de banlieue ordinaires de l’époque. Elles indiquent jusqu’où certains iront pour préserver leur confort ou leur mode de vie en période de crise.


  1. Voir Ahrens et coll., Earth-Sheltered Homes: Plans and Designs, op. cit. et Wade, Building Underground, op. cit.  

  2. Pour Ouroboros South, voir Norma Skurka et Jon Naar, Design for a Limited Planet, New York, Ballantine Books, 1976, p. 186-191; pour le bureau de Malcolm Wells et la maison Demuyt, voir Ahrens et coll., Earth Sheltered Homes, p. 92-95 et p. 106-109.  

Underground Space Center, dépliant d’information, v. 1981. Underground Space Center © University of Minnesota

Underground Space Center

À l’Université du Minnesota, à Minneapolis, l’Underground Space Center, ouvert en 1978, se consacre à la recherche sur la conception de bâtiments enfouis ou souterrains. On y met l’accent sur les possibilités que recèle l’espace souterrain en matière d’habitation, et non plus seulement en terme d’abri pour des infrastructures telles que les égouts, les câbles ou les trains. Le centre organise deux concours portant sur la création de bâtiments communautaires et d’habitations individuelles, tient des conférences et produira six publications (allant du beau livre grand public aux ouvrages plus spécialisés) traitant des constructions souterraines ou enfouies. Le centre possède aussi des archives et une bibliothèque rassemblant divers documents sur ces sujets.

L’ingénieur Ray Sterling et l’architecte John Carmody sont les deux principaux animateurs du centre, dont le siège, situé sur le campus de l’Université du Minnesota, est enfoui à 34 mètres de profondeur (et percé d’un puits de lumière faisant office de périscope géant).

Dans ses publications, l’Underground Space Center remonte le fil de toute la tradition de l’architecture de terre, depuis les habitations rupestres jusqu’aux huttes de terre du Midwest américain du début du XXe siècle. Son objectif principal, toutefois, est de rassembler les résultats des expériences et recherches menées entre les années 1950 et 1980, particulièrement aux États-Unis. En tirant les leçons de projets réalisés sur tous les fronts de la création architecturale – de la Geier House souterraine de Philip Johnson (1965), à Cincinnati, aux expériences suburbaines comme la Sticks and Stones House (1980) de Froehle, Saphir et Joos à Minneapolis –, le travail du centre permet de mettre en lumière des recherches marginales concernant autant l’architecture de terre que l’architecture sous terre.

Quand les prix du pétrole chuteront, il en sera de même pour les subventions consacrées par le Minnesota à la recherche pour la conservation de l’énergie1. Le centre ferme ses portes en 1988, et ses archives et sa bibliothèque sont transférées à l’école polytechnique Louisiana Tech de Ruston en Louisiane2.


  1. Ray Sterling, entrevue avec l’auteur, avril 2007.  

  2. Idem.  

Malcolm Wells, photographie et coupe avec annotations de Solaria, Vincentown, New Jersey, 1975. De Malcolm Wells, *Underground Designs (Andover, MA : Brick House Publishing, 1977), 10-11. Collection CCA © Robert Homan

L’architecture enfouie de Malcolm Wells

L’œuvre de Malcolm Wells est antérieure à la crise pétrolière de 1973. Dès le tour- nant des années 1970, il propose des projets qui tentent de repenser la relation entre sol et structure et les distinctions qu’elle crée, selon lui, entre nature et architecture1. Enfouir – littéralement – l’architecture dans le sol ou modeler le sol pour en faire de l’architecture lui paraissent des manières de transcender ces distinctions. Wells découvre également que l’enfouissement réduit les frais de chauffage, ce qui rend l’architecture sous terre de plus en plus pertinente à mesure que les prix augmentent2.


  1. Malcolm Wells, « Underground Architecture », dans J. Baldwin et Stewart Brand (dir.), Soft-Tech, Harmondsworth, Penguin Books, 1978, p. 103-111. 

  2. Dans ses premiers projets, Wells n’utilise que la terre comme matériau isolant. Il la combine par la suite avec d’autres matériaux d’isolation, en plus de miser sur un apport solaire actif. Voir Malcolm Wells, Underground Designs, Brewster, MA, autoédition, 1977, p. 4-5.  

Photographies comparant un bureau conventionnel bâtiment avec le bureau souterrain de Malcolm Wells à Cherry Hill, New Jersey, 1970. De Malcolm Wells, « Underground Architecture », dans Soft-Tech, J. Baldwin et Stewart Brand, dir (Harmondsworth, R.-U. : Penguin Books, 1978), 106. Collection CCA © Jay Baldwin and Stewart Brand / Whole Earth

Sa première structure enfouie est son bureau (1970), à Cherry Hill, dans le New Jersey1, construit à proximité d’un grand axe routier et d’un ensemble résidentiel. Wells fait valoir la quiétude du bâtiment, la verdure environnante et les économies de chauffage.

Quand surviennent les chocs pétroliers de 1973 et 1979, les regards se tournent vers lui. Il en profite : il donne des conférences, écrit, dessine et construit plus que jamais. Il tente non seulement de trouver une solution à la consommation d’énergie, mais aussi de proposer une critique de la destruction matérielle et esthétique du paysage perpétrée par l’architecture conventionnelle.


  1. Malcolm Wells, Gentle Architecture, New York, McGraw-Hill, 1981, p. 24. 

Malcolm Wells, façade sud avec des capteurs solaires de Solaria, Vincentown, New Jersey, 1975. Underground Space Center © Robert Homan

Ses réalisations les plus connues et les plus représentatives de cette période sont Solaria (1975) à Vincentown, au New Jersey, et sa résidence-bureau (1980) de Brewster, au Massachusetts. Les deux constructions sont partiellement enfouies et leurs murs en partie protégés par des remblais de terre. Le toit de Solaria est entièrement recouvert de 30 cm de terre, de 20 cm de paillis et de 10 cm d’humus, tandis qu’une partie des murs extérieurs sont couverts de remblais1. Solaria exploite également le solaire passif, par son exposition au sud, et le solaire actif, grâce à des capteurs verticaux. La résidence-bureau, étrangement longue et étroite, comporte quant à elle des lanterneaux en forme de pyramides sur toute sa longueur. Wells réalisera plusieurs autres structures souterraines et enfouies jusqu’aux années 1990.


  1. John Carmody et Ray Sterling, eds. Earth Sheltered Housing Design, seconde édition, New York, Van Nostrand Reinhold, 1985, p. 266.  

Michael Reynolds, Diagram of a Can Block, Thumb House, Taos, Nouveau-Méxique, 1977. Gracieuseté de Michael Reynolds © Michael Reynolds

L’architecture du rebut de Michael Reynolds

L’architecte Michael Reynolds considère les déchets comme une ressource naturelle1. Dans les projets qu’il réalise au début des années 1970, canettes vides et vieux pneus obtiennent une seconde vie en tant que matériaux de construction. Les canettes, assemblées à l’aide de fil de fer, sont empilées et liées avec du mortier pour ériger des murs. Les pneus sont remplis de terre compacte pour former des briques servant à monter des murs en « pisé ». Ces derniers sont parfois aussi protégés par un remblai de terre, créant ainsi une masse thermique qui favorise la mise en place de systèmes de chauffage et de climatisation passifs.


  1. Michael Reynolds, Earthship Volume 1: How to Build Your Own, Taos, Solar Survival Press, 1990.  

Michael Reynolds, façade sud de la Spinach House, Taos, Nouveau-Méxique, 1979. © Michael Reynolds

Michael Reynolds, la construction des murs de pneus de la Spinach House, Taos, Nouveau-Méxique, 1979. © Michael Reynolds

Michael Reynolds, plan de la Spinach House, Taos, Nouveau-Méxique, 1979. © Michael Reynolds

Érigée en 1979, à Taos, au Nouveau-Mexique, la Spinach House, avec son mur de pneus, propose une interprétation novatrice de la construction en pisé typique des climats méridionaux. L’intégration des propriétés isolantes de la terre à même la structure de la maison offre une solution aux problèmes de conservation de l’énergie.

Reynolds présente une articulation plus complexe des mêmes thèmes dans les Earthships qu’il conçoit à Taos à la fin des années 1980. Ici, la réutilisation des matériaux s’étend à l’ensemble de la structure et des systèmes, depuis le recyclage des eaux usées des salles de bains et des cuisines jusqu’aux bacs à fleurs où poussent fruits et légumes. La fonction de chacun des éléments des maisons se démultiplie à l’intérieur d’un système tellement intégré qu’il en atteint presque l’autarcie énergétique. Tous les besoins en énergie sont comblés à partir de ressources locales non transformées : soleil, vent, pluie et déchets.

La Turbine House de 1982, toujours à Taos, figure elle aussi parmi les exemples d’intégration de multiples technologies de conservation de l’énergie. Elle joint le pisé et les remblais de terre à l’énergie éolienne et au solaire actif. L’éolienne occupe ici une place fondamentale : en fait, toute la maison est conçue en fonction de l’exploitation des sources d’énergie.

Ces structures faites de rebut ou de matériaux recyclés affichent fièrement leur origine. Pour Reynolds, ce sont précisément les matériaux bruts qui ont servi à construire une maison et à l’approvisionner en énergie qui déterminent son esthétique : d’où les lignes arrondies des murs de pneus, les traces visibles des canettes ou la subordination de la maison à sa turbine éolienne.

John E. Barnard Jr, brochure publicitaire pour Ecology House, Osterville, Massachusetts, 1973. Underground Space Center © John E. Barnard Jr

Un modèle souterrain : Ecology House

L’architecte John Barnard réalise sa première Ecology House en 1973, à Osterville, au Massachusetts. Elle est, à l’origine, destinée à son propre usage de maison de vacances, et sert de modèle expérimental de construction souterraine. Le premier souci de Barnard est lié à une esthétique de l’environnement : il veut construire une habitation qui ne détruit aucun espace vert. « Comment faire une maison qui ressemble à un parc ? » est la question qu’il pose1. Pour lui, son modèle apporte la réponse et c’est ainsi qu’il le commercialise.


  1. Stu Campbell, The Underground House Book, Charlotte, VT, The Garden Way, 1980, p. 144 

Quand, peu après, les coûts de chauffage se mettent à grimper, l’Ecology House semble offrir une solution à ce problème également. Barnard prétend que sa maison permet de réduire les frais de chauffage de 75 % et que la coquille simple en béton n’exige pas l’intervention d’ouvriers qualifiés, ce qui la rend à la fois économique et accessible. Malgré la difficulté à confirmer la rentabilité, le plan très simple de cette maison sera souvent imité lors d’essais ultérieurs de constructions souterraines1.


  1. Bien qu’elle soit partiellement enfouie, la maison Bordie, construite en 1975 par les architectes Coffee et Crier à Austin, au Texas, utilise une couverture de terre de 56 cm et la même cour intérieure.  

John E. Barnard Jr., cour et panneaux solaires de Ecology House, Osterville, Massachusetts, 1973. Underground Space Centre © Jack Lane

Cour de la Ecology House, conçu par John E. Barnard Jr,, Osterville, Massachusetts, 1973. Underground Space Centre © Jack Lane

L’Ecology House est entièrement construite sous le niveau du sol, et son toit est recouvert de 25 à 40 cm de terre. La maison est divisée en quatre pièces qui reçoivent la lumière du jour par l’entremise d’une cour centrale à ciel ouvert. Dans la Stow House que construit Barnard en 1975, cette cour devient un atrium couvert qui sert de système passif de chauffage1. De l’extérieur, les seules parties visibles de la maison sont la rambarde qui entoure le haut du mur de la cour (afin d’empêcher les passants de tomber dans ce qui est en fait un trou béant), le panneau solaire et la cime de l’arbre planté dans la cour. L’intérieur n’offre que deux vues de l’extérieur : la cour et le ciel. Le paysage environnant est occulté, ce qui crée une rupture entre l’extérieur et l’intérieur, et confine la vie domestique à l’isolement.


  1. Gideon S. Golany, Earth-Sheltered Habitat: History, Architecture and Urban Design, New York, Van Nostrand Reinhold, 1983, p. 27.  

Jay Swayze, Underground Gardens & Homes: The Best of Two Worlds, Above and Below (Hereford, TX : Geobuilding Systems Inc., 1980) Collection CCA. © Geobuilding Systems / Jay Swayze

L’architecture de la peur de Jay Swayze

En fondant Geobuilding Systems, en 1974, Jay Swayze se lance dans la construction d’habitations souterraines de luxe à partir d’un ensemble de composantes exclusives aux structures souterraines et enfouies. Auparavant, Swayze a travaillé dans la construction d’abris antibombes et dans la conception de maisons de luxe; il a aussi été instructeur en défense contre la guerre chimique pour l’armée des États-Unis. Il combine ses centres d’intérêt et optimise le potentiel de l’abri antiatomique pour en faire à la fois une résidence et le lieu d’une utopie domestique. Son travail attire l’attention pendant la foire internationale de New York de 1964-1965, pour laquelle il conçoit le Pavillon de la maison souterraine1.

Les constructions de Swayze font ressortir un thème commun à de nombreux bâtiments souterrains : l’architecture de la peur. Le sous-sol devient un refuge contre les menaces de l’extérieur. Pour Swayze, il devient aussi un espace où l’on peut reconstruire une version idéalisée de cet extérieur2.

Une habitation souterraine de Jay Swayze est un luxueux pavillon de banlieue traditionnel placé à l’intérieur d’une plus grande coquille de béton. L’espace supplémentaire ainsi dégagé permet la création d’un jardin et donc de fenêtres donnant sur ce jardin, le tout entièrement en sous-sol. Le paysage est aménagé en fonction des souhaits du propriétaire, avec arbres et fleurs, véritables ou artificiels. Les fenêtres donnent sur des fresques reproduisant des paysages. Un système d’éclairage spécial permet de reproduire la lumière du jour, de l’aube ou du crépuscule. Sa Maison dans les Rocheuses comporte une piscine intérieure, un salon au plafond voûté et une grande fenêtre donnant sur une fresque reproduisant une vue du fleuve Hudson et de New York (le propriétaire est originaire du New Jersey). La fresque élimine toute gêne visuelle, y compris le smog. Paradoxalement, cette maison représente donc à la fois une échappatoire par rapport au monde extérieur et une manière de le préserver.

Swayze considérera toujours ses maisons souterraines comme des antidotes contre les catastrophes. Après s’être concentré sur le risque d’attaque nucléaire pendant la guerre froide, il s’intéresse, dans les années 1970, aux avantages des maisons souterraines du point de vue énergétique. Pendant les années 1980, il prétend que ce genre d’habitation en harmonie avec la nature permet de résoudre le problème de l’épuisement des ressources naturelles3. On ne sait pas s’il demeure actif après les années 1980.


  1. Pour en savoir plus sur la fortune critique de la maison souterraine de la Foire internationale de New York de 1964-1965, voir Rosemarie Haag Bletter, « The ‘Laissez- Fair,’ Good Taste, and Money Trees: Architecture at the Fair », dans Remembering the Future: The New York World’s Fair from 1939 to 1964, New York, Rizzoli, 1989, p. 105-136.  

  2. Pour une analyse plus poussée des thèmes de la guerre, de la peur et de leur relation à la sphère domestique dans l’oeuvre de Jay Swayze, voir Beatriz Colomina, « The Underground House », dans Domesticity at War, Cambridge, MA, The MIT Press, 2007, p. 275-292.  

  3. Jay Swayze, Underground Gardens and Homes: The Best of Two Worlds – Above and Below, Hereford, TX, Geobuilding Systems, Inc., 1980, p. 87.  

Jay Swayze, tour de ventilation et entrée de la Hamman House, Plainview, Texas, v. 1962. Underground Space Centre © Robert W. Kelly/Time & Life Pictures/Getty Images

Jay Swayze, fille dans sa chambre souterraine à Hamman House, Plainview, Texas, 1964. Getty Images, Hulton Archive © Robert W. Kelly / Time & Life Pictures / Getty Images

Mark Mack, dessin axonométrique avec coupe, plan et perspective intérieure de House on a Dam, 1977. CCA Collection. © Mark Mack

La vie sous terre selon Mark Mack

House on a Dam et House Totally Underground appartiennent au grand projet « 10 Californian Houses » de l’architecte Mark Mack, publié dans la revue à petit tirage Pamphlet Architecture1. Il ne s’agit pas d’un projet devant mener à des réalisations mais, selon Mack, d’une recherche conceptuelle tirant les leçons des réalisations du « First Bay-Area Style » de Californie et proposant des maisons qui se confondent au paysage au point d’en devenir quasi indissociables. Mack tente d’y parvenir par l’emploi de structures simples et d’intérieurs dépouillés.

Dans la House Totally Underground (Maison entièrement sous terre) de deux pièces, seuls deux grands lanterneaux émergent du sol et éclairent le séjour et la salle de bains. Mack semble partager les préoccupations des bâtisseurs de maisons souterraines quand il décrit l’intérieur comme étant « très conventionnel, ce qui fait oublier l’emplacement inhabituel de la maison2 ».

House on a Dam (Maison sur une digue) peut être construite sur n’importe quel terrain en pente. L’intérieur est simplement meublé d’une table, d’une chaise et d’un lit. La maison peut s’enfoncer dans le sol et en ressortir grâce à un système de poulies. Quand elle est enfoncée, on la distingue à peine, et quand elle émerge, elle se confond avec le ciel de par l’importance démesurée de sa fenêtre.

Ces deux maisons articulent succinctement les thèmes qui reviennent dans beaucoup de projets souterrains : la nécessité de tempérer l’aspect extrémiste de la vie sous terre par l’entremise d’intérieurs conventionnels et la disparition complète de la structure dans le paysage ou ce que Mack appelle la « nature ».


  1. Mark Mack, « 10 Californian Houses », Pamphlet Architecture, février 1978; deuxième édition, septembre 1980, San Francisco, William Stout Books.  

  2. Mack, « 10 Californian Houses », p. 17. 

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