Querido Amancio, organisée à l’occasion de notre nouveau fonds Amancio Williams, a donné lieu à une lecture publique de lettres personnelles, au cours de laquelle les participants - Emilio Ambasz, Florencia Álvarez, Giovanna Borasi, Fernando Diez, Kenneth Frampton, Mario Gandelsonas, Juan Herreros, Martin Huberman, Cayetana Mercé, Inés Moisset, Ciro Najle, Ana Rascovsky, Claudio Vekstein et Claudio Williams - ont commenté l’héritage d’Amancio Williams.

Cayetana Mercé a fait part de ce qui suit :


Chère Delfina,

Tu seras sûrement surprise de voir qu’une des lettres écrites dans le cadre de l’hommage à Amancio Williams, ton époux et associé quand tu exerçais la profession, t’est destinée. J’imagine aussi que c’est quelque chose qui te met mal à l’aise et dont tu te serais passée. Alors, je te demande pardon et les quelques paragraphes qui suivent t’expliqueront les motifs de ma « désobéissance ».

Le fonds d’archives Williams fera partie du patrimoine du Centre Canadien d’Architecture (CCA), une institution canadienne de premier plan vouée à la recherche, la réflexion et la critique dans le domaine de l’architecture. Elle possède une remarquable collection d’archives modernes et postmodernes. Je te le dis, Delfina, puisqu’il est possible qu’on ne t’ait pas mise au courant. Le fonds d’archives contient des projets que tu as codirigés, et qui sont, selon moi, les plus intéressants.

J’ai découvert le fonds d’archives Williams et le travail considérable abattu par Claudio Williams, ton fils, afin de cataloguer chaque plan et chaque dessin, de conserver et de diffuser l’œuvre d’Amancio. Admirable. Le fonds d’archives est le garant de la préservation de la mémoire collective. Sans cette mémoire, nous ne savons ni d’où nous venons ni où nous allons; c’est un mal qui afflige les Argentins et sans doute une des raisons pour lesquelles nous ne pouvons conserver ce fonds d’archives dans notre pays. Loin de moi l’idée de t’ennuyer, Delfina. Ce qui compte pour moi, c’est de t’expliquer pourquoi je t’ai écrit cette lettre.

La Maison sur le ruisseau (Casa sobre el Arroyo) à Mar del Plata est l’œuvre du fonds d’archives qui jouit de la plus grande reconnaissance. Je crois ne pas me tromper en affirmant qu’il s’agit d’une des œuvres qui confère aux archives une plus grande valeur. C’est une des rares œuvres d’Amancio à avoir été construite et qui encore de nos jours, malgré l’état d’abandon dans lequel elle se trouve, attire une nouvelle génération de visiteurs, qui la photographient et l’« instagrament » (je t’expliquerai à une autre occasion ce que cela signifie, Delfina). L’œuvre transcende sa modernité et les gens se l’approprient.

Delfina, cette maison est un de tes projets. Tu l’as bien sûr réalisé avec ton associé Amancio. Le projet aurait-il été le même si tu n’y avais pas contribué? Impossible de le savoir et cela n’a pas d’importance non plus. Seuls comptent les faits. Il s’agit ici d’un fonds d’archives et dans les fonds d’archives, les choses sont comme elles sont. Il te faudra l’accepter, même si à de multiples reprises, tu as dit ne souhaiter aucun crédit pour les œuvres de Williams auxquelles tu as contribué.

En 1942, un an après ton mariage, tu as réalisé ton premier projet avec Amancio et Jorge Vivanco : un immeuble d’appartements en bloc pour la ville de Buenos Aires, intitulé Logements dans l’espace (Viviendas en el espacio). Selon Roberto Fernández, « ces projets ont attiré l’attention et l’éloge du Corbusier, dans son (…) texte publié par la revue L’Homme et l’architecture en 1947 ».

On peut lire dans ta biographie publiée dans le blogue Un jour une architecte (Un día Una Arquitecta), sous la plume de Zaida Muxí : « La publication contemporaine d’Alberto Sartoris, Encyclopédie de l’architecture nouvelle, Milan, 1948, présente divers projets collaboratifs d’Amancio Williams et Delfina G. de Williams. Outre les œuvres collaboratives, on trouve des œuvres réalisées par Amancio Williams seul et d’autres auxquelles ont contribué César Janello, Colette Boccara de Janello et Jorge Butler. Cette reconnaissance de copaternité, sûrement mise de l’avant par Williams lui-même, disparaît dans la majorité des récits historiographiques le concernant ».

Tu sais sans doute qu’en septembre 2018, la Comisión de Monumentos, Lugares y Bienes Históricos (Commission des monuments, des lieux et des biens historiques) a décrété la paternité partagée de la Maison sur le ruisseau lors d’une présentation réalisée par l’architecte Carolina Quiroga. « La paternité de la Maison sur le ruisseau, conformément à la documentation analysée en profondeur, revient non seulement à Amancio Williams mais également à Delfina Gálvez. (…) Ce qui motive la révision des paternités des monuments ou des biens déclarés (…), afin d’empêcher la répétition de ces omissions intentionnelles. », précise la déclaration.

D’où la présente lettre, Delfina. Les femmes architectes d’aujourd’hui recherchent des modèles de référence. Nous souhaitons savoir ce qu’elles ont fait, ce qu’elles ont pensé, et comment elles ont fait face à des figures comme celle d’Amancio, « l’éminence argentine de l’architecture moderne », qui dans ta vie aura été ton camarade à l’université, ton époux, ton associé et le père de tes huit enfants.

Je suppose qu’une des stratégies pour pouvoir suivre ton propre chemin fut de lui laisser « l’architecture », pour consacrer ton talent et ton intelligence à d’autres choses, comme ta passion pour l’écriture, la présidence de l’Asociación de Mujeres Hispanistas (Association des femmes hispanistes) que tu as exercée jusqu’à tes 100 ans et la construction d’une famille nombreuse comptant tes enfants, tes petits-enfants et tes arrière-petits-enfants.

Merci, Delfina Gálvez, de représenter les femmes architectes au sein de ce précieux fonds d’archives qui nous réunit aujourd’hui. Nous savons que ton apport sera reconnu et valorisé, dans le cadre de cet hommage, bien que cela puisse t’incommoder. Nous nous dirigeons vers une époque où la visibilité des femmes dans l’histoire de l’architecture est fondamentale pour reconstruire notre mémoire et s’avère être une nécessité impérieuse pour toute la discipline.

Cayetana Mercé

Buenos Aires, 11 March 2020

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